Skip to main content

Le calme avant des vents contraires ? Les derniers développements comme le dernier chiffre du chômage américain ‘polémique’, les tensions géopolitiques et les changements structurels dans la politique monétaire aux Etats-Unis laissent présager un second semestre ou une fin d’année volatile dans les marchés.

Les incertitudes sur la trajectoire de l’économie américaine se sont épaissies, avec la publication du dernier rapport de l’emploi de juillet qui a étonné par sa faiblesse. Une des plus mauvaises surprises macroéconomiques concernant cette statistique pour les marchés depuis près d’une cinquantaine d’année avec la forte révision du mois précédent. Le scénario de stagflation a gagné en probabilité, un phénomène qui se caractérise par une croissance atone et une inflation forte.

De plus en plus d’analystes convergent vers un ralentissement marqué de la croissance américaine au second semestre, au fur et à mesure que les droits de douane impacteront l’économie. Les États-Unis peuvent rentrer dans un scénario de « ralentissement » ou de « stagflation » d’ici la fin 2025 mais celui d’une possible « récession cyclique » n’est pas encore totalement écarté.

La forte révision à la baisse des créations de poste en juin et en mai -258.000 – (rapport de l’emploi) est un effet typique d’une phase de ralentissement prononcé. « Le contexte de “stagflation” devrait être qu’un phénomène assez passager, » explique Enguerrand Artaz, Stratégiste, La Financière de l’Échiquier (LFDE). « Le risque le plus fort est, selon nous, celui d’une récession déflationniste classique. Les mauvais chiffres de l’emploi du mois de juillet 2025 (publiés le 1e août) traduisent la dégradation de plus en plus préoccupante du marché du travail américain et les risques que cela induit pour la consommation ainsi que la croissance, » ajoute Enguerrand Artaz.

Cependant le stratégiste ne croit pas à une période longue de stagflation mais plus à celle d’une récession déflationniste classique.

« Face au ralentissement économique qui s’annonce, la hausse des prix (avec la hausse temporaire des prix alimentés par les tarifs douaniers) devrait impacter davantage la capacité de consommation des ménages, faisant chuter encore la demande. Cette situation devrait assez rapidement mener à une stagnation, peut-être même ensuite, une baisse des prix sous les effets d’une demande qui se réduit. Le contexte de “stagflation” devrait donc n’être qu’un phénomène assez passager. Le risque le plus fort est, selon nous, celui d’une récession déflationniste classique, » conclut le stratège de LFDE.

90 % de probabilité pour une baisse de taux dès septembre (brokers)

Chez Amundi Investment Institute, le scénario de stagflation n’est pas exclu mais la récession reste la préoccupation la plus immédiate selon Guy Stear, Head of Developed Markets Research at Amundi Investment Institute qui poursuit :

« Le ralentissement prononcé de demande d’emploi que laisse transparaitre le rapport sur l’emploi américain devrait atténuer les pressions sur les salaires et les prix, offrant à la Réserve fédérale américaine la marge de manœuvre nécessaire baisser les taux. »

En effet, Jerôme Powell, le président de la Federal Reserve, a rappelé lors de la dernière réunion de politique monétaire que seule une dégradation de l’emploi l’inciterait à assouplir les taux. En somme, les dernières données ne suggèrent pas de catastrophe imminente mais font espérer une posture plus accommodante de la Fed.

Guy Stear ajoute : « ce rapport crédibilise l’augmentation des risques de récession plutôt qu’une stagflation. Il est vrai que le taux de chômage toujours bas, à 4,2 %, reflète une contraction de la population active, mais probablement due à des politiques d’immigration restrictives. Le phénomène de stagflation n’est pas exclu si l’économie ralentit en raison de contraintes liées à l’offre – et non une faiblesse de la demande – et que les décideurs politiques interprètent mal la situation, en réagissant avec des baisses de taux et des mesures de relance budgétaire. Dans ce cas, le risque de stagflation pourrait augmenter, que les droits de douane pourraient encore accroitre à travers d’une hausse des prix à la consommation. En bref, si la récession reste la préoccupation la plus immédiate, le scénario de stagflation ne peut être exclu. »

Un chiffre qui fait aussi polémique

Chistopher Dembik, Stratégiste chez Pictet Asset Management reste confiant dans la croissance américaine mais revient aussi sur ce chiffre contesté de la révision des chiffres des mois précédents dans le rapport de juillet : « L’Administration Trump a tort de parler de chiffres manipulés de l’emploi. En revanche, il faut reconnaître que les révisions des créations d’emplois pour mai et juin sont anormales. Cela survient lorsqu’il y a des événements climatiques mais ce n’était pas le cas. Ce n’est pas non plus lié à la saisonnalité, à un taux de collecte de l’enquête bas ou encore à une révision des modèles du BLS afin de mieux prendre en compte la démographie. Il semble qu’il y ait eu un problème au niveau de la remontée des données administratives qui portent uniquement sur les créations d’emplois dans le secteur public.

Une explication émise sur cette forte révision de créations d’emploi du mois de juin, va dans ce sens. En effet, il semble que les petites entreprises plus sensibles au cycle économique, communiquent avec retard leurs réponses aux enquêtes du département du Travail.

Et Christopher Dembik de conclure : « Dans tous les cas, il est trop tôt pour remettre en cause notre scénario central pour l’économie américaine : inflation supérieure à la cible, sans que ce soit préoccupant, et croissance qui reste toujours proche de son potentiel. »

La réaction du marché obligataire

La réaction et la lecture du marché obligataire après le chiffre du chômage de juillet traduit plus une crainte du marché, d’un ralentissement que d’une hausse de l’inflation avec des rendements sur le 10 ans US Treasury approchant 4,2 % alors que le niveau était encore de 4,5 % voici quelques semaines détaille-t-on chez DNCA.

DNCA, le spécialiste des investissements dans les marchés obligataires estime que la publication du chiffre du chômage américain de juillet ouvre enfin la voie pour une baisse de taux de la Fed avant la fin d’année. Le marché anticipe déjà entre deux et trois baisses de taux d’ici fin décembre, pour un taux terminal (3m dans 3 ans) autour de 3% / 3,25%, plus ou moins en ligne avec les prédictions de la Fed (3%). Toujours selon DNCA, ces chiffres reflètent parfaitement leur scénario d’anticipations macroéconomiques, c’est-à-dire une croissance économique qui ralentit mais qui ne va pas jusqu’à une récession avérée.

Enfin, DNCA privilégie dans ses investissement obligataires les parties longues de la courbe. Paul Lentz, Fixed Income Analyst chez DNCA estime qu’il n’y a plus rien de significatif à gagner sur les taux courts, d’autant qu’une légère poussée d’inflation conséquente aux barrières douanières perturbera ces taux courts.

Un Vix index interpellant…

A noter encore que le Vix index, l’index de volatilité, appelé aussi indice de la peur, est tombé à son plus bas niveau (14,4 le 13 aout) depuis mi-décembre, indiquant une certaine complaisance du marché, signifiant une confiance dans les mois à venir en une période d’optimisme et de stabilité…

Daniel Pechon

Author Daniel Pechon

More posts by Daniel Pechon

Leave a Reply