Les indices chinois, très éloignés de leur plus haut, pourraient entamer une phase haussière solide. DeepSeek a surpris et effacé l’impression que la Chine est à la traine, un signe, un argument solide pour les optimistes. Et si la baisse provoquée par la guerre commerciale offrait un point d’entrée attrayant à l’investisseur long terme dans une économie en phase de sortir d’une longue parenthèse…
Depuis son sommet historique atteint en 2021, la bourse chinoise a rebondi mais affiche encore une perte d’environ 30 %. Le ralentissement économique mêlé à une crise immobilière a refroidi l’ardeur des investisseurs. Pour ne rien arranger, les déboires financiers de nombreux promoteurs ont étayé les nouvelles économiques en alimentant la morosité des ménages, sur fond de logements inachevés et de chutes des prix du mètre carré.
Le 7 avril dernier, les droits de douane décidés par Donald Trump, ont fait sombrer le CSI 300, l’indice boursier de la bourse de Shanghai et Shenzhen composé de 300 des principales capitalisations boursières, de 10 % en une seule journée, même 15 % pour le Hang Seng, l’indice de Hong Kong, axé sur plus des valeurs de croissance. Depuis, le président américain semble chercher une issue favorable à l’affrontement avec la Chine et a promis d’être « très gentil » avec Pékin et affiche son désir de conciliation avec le grand rival géopolitique.
Le Fonds monétaire international, Goldman Sachs et UBS ont tous récemment révisé à la baisse leurs prévisions de croissance économique pour la Chine en 2025 et 2026, citant l’impact des tarifs de Trump – aucun d’entre eux ne s’attend à ce que l’économie atteigne l’objectif officiel de croissance de Beijing.
Le marché chinois a-t-il mangé son pain noir et atteint un point bas ? Même si la guerre commerciale survient à un moment particulièrement difficile pour son économie, qui flirte avec la déflation en raison de la croissance lente des revenus et d’une crise immobilière prolongée. Acheter au son du canon, dit le dicton….
Et les analystes s’attendent à ce que Beijing offre davantage de mesures de relance monétaire et budgétaire au cours des prochains mois pour soutenir la croissance.
Selon Lang Wan Simond, fondatrice et gérante de la stratégie Pictet TR – Mandarin, l’horizon pourrait s’éclaircir, malgré l’épisode de ces nouveaux tarifs douaniers. Il est important de dresser le décor.

Depuis la première vague de tarifs douaniers en 2018, les exportations de la Chine vers les Etats-Unis, n’ont pas retrouvé leur volume. En effet, la Chine a réduit ses exportations vers les Etats-Unis et les entrepreneurs ont poursuivi l’objectif malin de contourner les tarifs. De nombreuses entreprises chinoises ont choisi le Mexique qui a récupéré une partie des exportations ou encore l’Asie du Sud-Est (Vietnam, Cambodge, Malaysie…) pour domicilier leur production, principalement de textile. Apple a aussi réorienté une partie de production de ses IPhone, en la réduisant de 100 % à 80 %, en optant pour l’Inde comme deuxième position d’ancrage.
Un redéploiement des activités, une économie différente
En résumé, la gérante de la stratégie Pictet TR-Mandarin explique que la Chine a entamé un redéploiement de ses activités. Et aujourd’hui, le président chinois apparait comme un partenaire plus fiable dans les régions asiatiques que Donald Trump.
Autre changement important, le pouvoir tend à nouveau ses mains vers les entrepreneurs. Dès l’automne dernier, de nouvelles mesures de soutien à l’économie chinoise ont été annoncées, mais surtout un signal fort a été envoyé récemment par Pékin : l’annonce d’une rencontre entre le président Xi Jinping et plusieurs figures emblématiques du secteur privé, dont Jack Ma qui avait été mis à l’écart, suite à des propos mal reçus par les autorités, mais aussi le créateur de DeepSeek. « C’est un virage important, » selon Lang Wan Simond et signifie une véritable volonté d’accompagnement stratégique.
La Chine semble progressivement réorienté le cœur de son économie vers la technologie. Et évidemment, l’IA en est un champ de bataille ouvert. Son essor a joué un rôle clé dans le réveil boursier récent. L’annonce de DeepSeek a surpris tout le monde et a démontré la capacité du pays à rivaliser avec les géants américains, à effacer l’impression que la Chine est à la traine.
Un bull market ?
Mais, au-delà de ces annonces, le gouvernement tente également de favoriser le développement du secteur privé, en mettant en place un environnement plus compétitif, notamment au sein de quelques secteurs-clés : l’industrie, les technologies de pointe ou encore la transition énergétique.
Dans ce contexte, Lang Wan Simond voit plus loin : « les niveaux de valorisations sont actuellement attrayants », Elle veut croire que, le marché boursier chinois offre une opportunité tactique pour les investisseurs. Cerise sur le gâteau, les institutionnels sont encore absents et sous-pondérés en valeurs chinoises. Elément important pour favoriser un marché haussier…
Et pour la gérante, les tarifs douaniers sont une parenthèse : « Avant la décision des tarifs douaniers, nous étions déjà relativement constructifs et nous y sommes toujours. Le pire est derrière nous. Le secteur immobilier est à présent massivement nettoyé et les dettes des gouvernements locaux ont été dégonflées. L’économie est beaucoup plus saine. Le cycle est peut-être déjà en train de se retourner. Les révisions de bénéfice sont mieux orientées. Les bonnes étoiles commencent à s’aligner et rappel, les investisseurs sont sous-investis en valeurs chinoises. Avec le pessimisme ambiant, toutes les cases sont cochées pour le départ d’un ‘bull market’ (marché haussier). »
Une dernière brique
Il manquait peut-être encore une brique au mur : faire disparaitre la déflation amenée par la surproduction, la surcapacité existante et une absence de demande du consommateur. « Un stimulus, plus généreux offert par le gouvernent chinois à sa propre population est nécessaire et était dans les tuyaux avant qu’éclate cette crise des tarifs. Malheureusement, depuis, les autorités ont dû adapter leurs priorités. Mais nous restons convaincus que celles-ci finiront par délivrer plus de stimulus vers les consommateurs plutôt que d’investir dans les infrastructures ou les capacités de production, » relate Lang Wan Simond.
La Chine commence à être leader dans de nombreux secteurs. DeepSeek est un exemple surprenant et concret, un résultat atteint sans aide extérieure. Les investissements du secteur privé dans l’IA ont augmenté sensiblement. Les voitures électriques et les voitures smart (voitures qui se garent automatiquement, gèrent les déplacements su autoroute, etc.) sont en plein essor et deviennent des standards en Chine. « Les découvertes en Biotech se multiplient. Les ventes de molécules, de patentes explosent. Avec des coûts réduits, dans la même logique que DeepSeek, le secteur biotechnologique est en pleine effervescence.
TR-Mandarin, la stratégie gérée par Lang Wan Simond et de type absolu, conserve un biais long pour optimiser le rendement. Face à ses meilleures
convictions et idées sélectionnées indépendamment du benchmark, la gérante associe des positions vendeuses (baissières) dans des titres jugés trop richement valorisés ou aux fondamentaux qui se détériorent. Cette balance, cette tactique permet de mieux amortir des retournements de marché, limiter les dégâts. Exemple, le 7 avril, jour de la décision des tarifs douaniers, la stratégie n’a perdu que 4 % comparé à la baisse de 15 % du Hang Seng. Dans l’incertitude, la gérante a diminué la voilure, en diminuant les postions acheteuses mais aussi vendeuses qui ont bien performées. Les paris actuels sont plus orientés vers l’économie intérieure et non exportatrice, détaille la gérante dont la stratégie est en baisse d’un peu plus de 5 % depuis le début de l’année en euros. Cependant, calculée en dollars américains, la monnaie de base de la stratégie, elle est en hausse, ce qui distingue la performance de la gestion de l’effet monétaire.
Selon les données Quantalys, Pictet TR-Mandarin Eur Acc, la stratégie affiche une performance positive de 14,2 % sur les trois dernières années (au 29 avril) contre 9,38 % pour sa catégorie. Elle affiche une performance qui dépasse le benchmark depuis ses débuts, avec une volatilité divisée par deux. Les positions vendeuses n’y sont pas étrangères.







