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Par Christofer Govaerts, chief economist Nagelmackers

Depuis le week-end des 10 et 13 mars, le monde a de nouveau été confronté à des incertitudes sur les marchés financiers, qui, cette fois-ci, proviennent d’un secteur où on ne les attendait pas : le secteur financier. Récapitulons brièvement ce qui s’est passé.

Un vent défavorable se lève aux Etats-Unis : Les banques de petite et moyenne taille vacillent

La panique s’installe lorsque la Silicon Valley Bank (SVB) – la 16e banque des Etats-Unis – fait faillite le 10/03. Le même week-end, des problèmes apparaissent également à la First Republic Bank, qui est ensuite soutenue in extremis par une injection de capital conjointe des 11 principaux acteurs financiers américains, d’une valeur de 30 milliards de dollars.

Des vents défavorables soufflent sur l’Europe depuis les Etats-Unis : Crédit Suisse en difficulté

Au début de la semaine dernière, des problèmes sont apparus au sein de Credit Suisse, la deuxième banque suisse. La banque, qui est embourbée dans des scandales et des irrégularités depuis des années, est en train de se faire éjecter du marché, à tel point que les régulateurs et la Banque nationale suisse sont intervenus mercredi dernier. Le Credit Suisse a bénéficié d’une bouée de sauvetage de 54 milliards de dollars, mais il semble que cela ne suffise pas : les dépôts sont vidés à une vitesse vertigineuse. Cette situation s’est accélérée le week-end dernier, lorsque le Crédit Suisse est tombé dans l’escarcelle du numéro un suisse, UBS. Le prix du rachat s’élève à 3,3 milliards de dollars, tandis que les détenteurs d’obligations AT1 (subordonnées et CoCo) en sont pour leurs frais. 17 milliards de dollars ne seront en effet pas versés. La garantie totale de l’Etat liée à cette acquisition s’élèverait à environ 100 milliards de dollars.

Le lundi 20/03, nous avons assisté à l’action coordonnée des principales banques centrales mondiales, grâce à laquelle des lignes de swap en dollars sont désormais mises à disposition quotidiennement pour les acteurs financiers qui auraient des difficultés à compléter leur refinancement en dollars.

Causes sous-jacentes : les banques systémiques (« moral hazard & too big to fail ») – (dé)réglementation et liquidité

On reproche à nouveau à certains acteurs d’être devenus trop gros, ce qui a sans doute encouragé des comportements imprudents dans certains cas (moral hazard) : ce comportement consistant à considérer que l’argent est gratuit s’avère dès lors irresponsable, car le système financier ne peut pas se permettre la défaillance d’un acteur majeur. La banque SVB en est d’ailleurs la preuve en ce qui concerne le contrôle interne des risques.

La (dé)réglementation est également une fois de plus au centre des préoccupations. On ne peut pas ignorer que l’administration Trump a, à l’époque, affaibli certains mécanismes de régulation pour les plus petits acteurs. Toutefois, dans le cas des Etats-Unis, outre l’éternelle bataille entre réglementation et déréglementation, il existe une autre question centrale, à savoir l’applicabilité dela réglementation. Par exemple, il apparaît maintenant que le superviseur de SVB – la branche de San Francisco de la Réserve fédérale – a envoyé des lettres de recommandation à SVB jusqu’à six fois au cours de l’année dernière, soulignant que la situation du bilan devenait précaire en raison de l’incapacité à couvrir un grand nombre de risques du bilan dans un contexte de hausse des taux d’intérêt.

Enfin, intéressons-nous à la liquidité : la FED, la BCE et les banques centrales du Japon, du Royaume-Uni, du Canada et de la Suisse ont annoncé une action coordonnée à partir du 20 mars pour assurer la liquidité en dollars du système financier sur une base quotidienne jusqu’à la fin avril au moins (éventuellement prolongeable). L’automne 2008 a prouvé que cette question semblait élémentaire à l’époque pour rétablir le calme, la Fed ayant injecté 557 milliards de dollars par ses propres moyens via des swaps interbancaires avec le monde entier. Cette action coordonnée pourrait reposer sur deux hypothèses : soit on a tiré les leçons du passé (gestion de crise) et cette annonce est une sorte de mesure de précaution pour rassurer les marchés ; soit on est déjà contraint d’agir aujourd’hui pour éviter le pire.

Aujourd’hui, le calme semble être plus ou moins revenu et les incendies ont été éteints. Pour l’instant et jusqu’à nouvel ordre, nous partons du principe que la première hypothèse est en vigueur.

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